Mardi 11 Septembre @ VIPress.netPV : pluie de réactions après l'ouverture de l'enquête antidumping de l'UE
Le groupement EU ProSun est satisfait de la réponse donnée par Bruxelles à sa demande d'enquête sur le dumping des fournisseurs chinois de panneaux photovoltaïques. Milan Nitzschke, président d’EU ProSun, rappelle que « les sociétés chinoises vendent des panneaux solaires en Europe à des prix inférieurs de 60% à 80% à leur coût de production. Leurs pertes sont toutefois compensées par l'état chinois alors qu'une vingtaine de fabricants majeurs européens a été contrainte de cesser son activité rien qu’en 2012. » L'Afase, ou Alliance pour une énergie solaire accessible, réfute, elle, ces allégations et demande à la Commission Européenne de résister au protectionnisme …
Créée début 2012, l'Afase compte aujourd'hui près d'une centaine d'entreprises internationales représentant l’ensemble de la chaîne de valeur photovoltaïque (fournisseurs de matières premières, fabricants d'équipements de production, développeurs de projets, installateurs, sociétés de maintenance, etc), mais aussi et surtout de grands fabricants de panneaux photovoltaïques dont la production se situe en majeure partie sur le sol chinois comme Hanwha SolarOne, JA Solar, Suntech Power, Trina Solar, Yingli Solar et Canadian Solar. Leur production cumulée pourrait représenter près de 50% de la capacité mondiale de production de panneaux PV. Pour Greg Spanoudakis, président EMEA de Canadian Solar qui est membre de l'Afase, « la plainte d'EU ProSun n'est pas justifiée et l'ouverture d'une enquête par l'UE relève d'une motivation politique. Tout le monde est juste en train de taper sur les Chinois. Je suis convaincu que, au final, il n'y aura pas de taxes mais nous aurons perdu 14 ou 15 mois. Nous savons qui est à l'origine de cette plainte antidumping. Il faut se demander pourquoi des sociétés comme SolarWorld ou Q-Cells ont pu se permettre d'en arriver à leur situation actuelle. Dans le secteur du solaire, il faut rester compétitif au niveau des coûts. » Canadian Solar produit environ 85% de ses panneaux PV en Chine, le reste dans une usine à Guelph, en Ontario (Canada). « Les coûts de production de nos panneaux solaires sont supérieurs d'environ 20% au Canada par rapport à la Chine en raison d'écarts de prix en matière d'énergie et de main d'oeuvre d'une part et en raison des investissements importants réalisés en robotique au Canada », nous a précisé Greg Spanoudakis.
Pour EU ProSun, la Chine a adopté une stratégie agressive à travers son dernier plan quinquennal, afin de prendre le contrôle du marché solaire mondial d’ici 2015. Partant d’une part de marché de zéro en 2004, la Chine s’est ainsi octroyée plus de 80% du marché européen.
Commentaires des industriels
SolarWorld, qui est l'initiateur d'EU ProSun, s'est félicité de la décision de Bruxelles. La société a déjà été à l'origine d'une action similaire lancée aux Etats-Unis fin 2011 qui a abouti à des taxes compensatrices provisoires de 30% à 250% sur les panneaux PV réalisés avec des cellules solaires de fabrication chinoise. La décision définitive devrait intervenir vers la mi-novembre.
Suntech Power a notamment déclaré : « La mission de notre industrie est de rendre l'énergie solaire accessible à tous et nous sommes convaincus que des barrières commerciales ne feront que retarder l'accomplissement de cet objectif ... nous pouvons démontrer notre stricte adhésion à l'équité des pratiques commerciales internationales. Nous passons actuellement en revue l'avis d'enquête et coopérerons entièrement avec la Commission Européenne dans son investigation. » Même son de cloche de la part de Yingli Green Energy qui précise que la plainte antidumping est infondée.
Pour Alexandre Minuzzo, pd-g de Senersun, une entreprise française du photovoltaïque qui fabrique ses panneaux PV en Chine au sein de la compagnie Senergy fondée avec un partenaire local, « sans contester l'importance du respect des règles fondamentales en matière de concurrence, des mesures punitives sur les importations de modules photovoltaïques chinois auraient surtout des conséquences négatives pour les consommateurs d'une part, mais aussi pour les installateurs et distributeurs européens, sans soutien réel des fabricants européens. Les installateurs et distributeurs européens luttent quotidiennement avec de faibles marges et un marché instable, et de telles mesures risquent de leur être dommageables. Il est de plus nécessaire de rappeler que ce sont les efforts considérables entrepris par les fabricants chinois au cours des dernières années qui ont permis une réduction importante des coûts liés à l'énergie solaire, ce qui doit rester une priorité pour notre industrie afin d'en assurer la pérennité et l'accès universel."
Philippe Pflieger, directeur Conergy SAS, précise : "nous sommes pour la libre concurrence, et nous souhaitons vendre nos produits sur tous les marchés. Si nous commençons à mettre des barrières contre certains pays, cela impactera aussi nos activités dans ces pays et les fabricants européens seront globalement les perdants. Le marché va se réguler. Il y aura toujours une demande pour des produits chinois et une demande pour des produits de moyenne et haut de gamme. Les deux peuvent cohabiter."
Des réactions politiques
En France, les ministres de l'environnement, Delphine Batho, et du redressement productif, Arnaud Montebourg, ont déclaré dans un communiqué de presse, avoir « pris connaissance avec satisfaction de l'ouverture formelle d'une enquête antidumping à l'égard d'entreprises chinoises fabricant des panneaux solaires photovoltaïques...pour une transition énergétique ambitieuse, qui passe par l'essor des énergies renouvelables, il est essentiel de garantir à la filière photovoltaïque, comme à toutes les autres filières, les conditions d'une concurrence loyale permettant leur développement efficace et pérenne, tout en s'assurant de la plus haute qualité environnementale des produits. »
En Allemagne, la chancelière Angela Merkel et le ministre de l'environnement Peter Altmeier ont tous deux plaidé pour la recherche d'une entente commerciale malgré l'ouverture de l'enquête de Bruxelles.
Enfin, les autorités chinoises envisageraient, selon certaines rumeurs, des mesures de rétorsion envers des industriels européens, par exemple en instaurant des taxes douanières sur l'importation de silicium solaire en Chine, ce qui impacterait des fournisseurs européens.
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