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« La baisse des tarifs d'achat est salutaire, mais ... »

Centralesphotovoltaïques>France>Politique/Réglementation
29/09/2010 19:54:16 :

Les changements dans la réglementation tarifaire du photovoltaïque ne cessent de susciter des commentaires de toutes parts. La filière solaire française semble toutefois avoir pour gros défaut un manque de transparence. Nous avons demandé à Pascal Martin, co-gérant de la société Armorgreen de donner son éclairage …
 
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Armorgreen, société bretonne spécialisée dans le domaine des énergies renouvelables et prioritairement dans le solaire, emploie 35 salariés et intervient sur le Grand Ouest avec un carnet de commande de 10 MWc, ce qui en fait l’un des principaux acteurs du photovoltaïque dans cette région. Elle a été créée en 2007 en co-gérance avec Jean-Paul Legendre, président du groupe éponyme leader du BTP dans l'Ouest auquel elle reste adossée.

La baisse des tarifs d'achat était-elle nécessaire ?
La nouvelle baisse des tarifs d'achat de l’électricité de source photovoltaïque doit être accueillie avec soulagement par les contribuables et par les acteurs de la filière, dont certains semblaient avoir perdu toute lucidité si l'on regarde leurs ambitions affichées ... Dans tous les cas, les recettes sont les mêmes : un secteur en forte croissance grâce à de fortes incitations fiscales, une force de vente agressive appuyée par des téléopérateurs peu scrupuleux et des produits chinois dépourvus de toute garantie. En cela, la baisse des tarifs est salutaire. Toute situation de rente disproportionnée entraîne forcément une bulle, qui doit éclater un jour. Mieux vaut un recadrage brutal qu'une situation à l'espagnole : plus vous montez haut …plus vous tombez de haut. Mais tout ceci n’aurait jamais eu lieu - une bulle d’une telle ampleur ne se serait jamais formée - si l‘Etat avait mis en place à temps un mécanisme d’ajustement des tarifs souple et efficace, à l’instar de l’Allemagne.

En quoi la façon dont l’Etat gère cette bulle est-elle critiquable ?
Les tarifs d'achat existent depuis plus de 4 ans, et l’Etat se pose seulement aujourd’hui la question d’une « adaptation nécessaire du système de régulation des tarifs d'achat, qui doit devenir plus réactif au développement de la filière », après les errements et atermoiements des derniers mois. L’Etat jette la pierre aux « spéculateurs », alors qu'il ne peut s’en prendre qu’à lui même. Nous avions la chance d'avoir deux exemples européens à notre porte : la « success story » du solaire allemand et le fiasco espagnol. Pourquoi avoir fait le choix d’imiter le second alors que l’Allemagne nous montrait la voie d'une régulation de marché efficace ? Peut-on faire preuve d’autant d’amateurisme dans la gestion d’une politique publique aussi cruciale ?
L'Etat n’est toutefois pas le seul responsable de ces dysfonctionnements. L’incapacité des syndicats de branche à donner l'alerte dès le début de la formation de la bulle spéculative en juillet 2009, à articuler des propositions consensuelles, et à devenir un interlocuteur crédible auprès des autorités publiques a également joué un grand rôle dans le marasme actuel. D’ailleurs, l’efficacité de 4 syndicats pour un marché d’à peine plus de deux milliards d’euros est réellement en question !

L'évolution des tarifs maintenant acquise met-elle en danger la filière ?
L'état a contribué à mettre sur pied une filière qu’il a appelé de tous ses voeux, puis en a exagéré l’impact quant au nombre de créations d’emplois verts, et est maintenant en train de la condamner sans appel. L’objectif initial consistait à protéger le marché français, et à susciter la création d’une filière solaire franco-française afin d'éviter une invasion de produits et sociétés de pays plus en avance dans ce domaine tels que l’Allemagne et l’Espagne. Des trésors d’imagination ont été déployés, avec des inventions telles que l’intégration au bâti, et avec des règles et définitions d’ailleurs devenues si complexes que même nos ingénieurs gaulois y perdent leur latin. Cette politique commençait à porter ses fruits avec la naissance d'un tissu de PME. L’instabilité règlementaire qui caractérise désormais le secteur fragilise cet édifice. En Allemagne, ce sont les PME qui font la force de la filière solaire, et de toute l'économie d’ailleurs. En France, au delà des effets d’annonces sur la promotion et la vertu des PME, c’est à nouveau une politique de favoritisme des « grands champions » qui est en train d’être mise en place (EDF Energies Nouvelles, GDF SUEZ, etc.).

Quels devraient être les leviers de rééquilibrage de la filière ?
La rentabilité d’une centrale solaire photovoltaïque est conditionnée par son coût au Wc (le coût de la puissance installée) et par le taux d’ensoleillement, donc son lieu d’installation. Sachant qu'un investisseur fera toujours en sorte de maximiser sa rentabilité, avec un minimum attendu de l’ordre de 8% dans le cas du solaire PV, et que les coûts d’installation sont identiques pour les installateurs sur tout le territoire français (panneaux, onduleurs, main d’œuvre, etc.), plus un installateur sera situé au nord, plus la pression sur son prix de vente sera grande et plus il verra sa marge se réduire voire disparaître au point de faire des pertes.
En conséquence, l’application d’un tarif d'achat uniforme sur l’ensemble du territoire français augmente la menace de déstabilisation économique de la filière au nord du pays, et soutient de façon disproportionnée le nombre d’installations dans le sud du pays.
Un tarif d'achat uniforme s'oppose à un développement harmonieux sur tout le territoire, une volonté affichée par l’Etat, et à la logique de développement de sources d’énergie locales produites sur leur lieu de consommation. Ces deux volets pourraient être aisément corrigés sans augmenter le coût de la CSPE et donc le coût pour les contribuables, avec la simple application d'un coefficient géographique.
Ceci a d’ailleurs été retenu lors de la modification des tarifs d'achat l'an passé, mais malheureusement pour les seules centrales au sol, fruit de la politique active de lobbying menée par les gros opérateurs du secteur. En effet, autant l’installation de centrales solaires photovoltaïques en toiture est surtout une activité locale réalisée par des entreprises locales, autant celle de centrales au sol est noyautée par une dizaine d’acteurs actifs au plan national.

Quel serait un tarif d'achat équitable ?
Nous n'avons pas la prétention d'avoir la réponse à cette question de façon absolue. Pour essayer cependant d'apporter quelques éléments de réponse, nous pourrions dire que le tarif équitable est celui qui permettrait à n'importe quel investisseur d'obtenir un rendement de 8%, quelque soit l'endroit où il investit sur le territoire français. Diminuer le rendement du photovoltaïque au dessous de 8%, c'est lui faire perdre son intérêt aux yeux des investisseurs et donc le condamner. Laisser ce rendement grimper au delà de 8%, c'est le rendre trop attractif et donc par là-même entraîner la création d'une bulle spéculative.

Quel coefficient d'ajustement départemental ou régional serait le mieux adapté à la situation en France ?
Étant donné les différences d'ensoleillement en France (50% d'ensoleillement en plus à Nice qu'à Lille), cela reviendrait à remplacer le nouveau tarif intégré uniforme de 0,44€/Kwh par des tarifs allant d'environ 0,35€/KWh à Nice à environ 0,55€/KWh à Lille. Pour éviter toute accusation de partialité de cette proposition faite par une société située en Bretagne, où tout le monde croit qu'il pleut tout le temps, je tiens à signaler que la mise en place d'un tel système serait à peu près neutre pour nous puisque nous nous situerions en milieu de fourchette, c'est à dire au niveau du nouveau tarif à 0,44€/KWh.
SOMMAIRE du 29/09/2010
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